EXCLUSIF : Mme Ousseini Hadizatou Yacouba, Présidente Nationale des femmes du PNDS-TARAYYA

« Comment des gens qui aspirent à gouverner notre pays peuvent le faire en détruisant les investissements réalisés ? » Mme Ousseini Hadizatou Yacouba.

De passage à New York, Mme Ousseini Hadizatou Yacouba a bien voulu répondre aux questions de Niger Voice, la radio des nigériens aux USA lors d’une interview réalisée par Mohamed SEIDOU. Au cours de cet entretien, repris ici par Niger Inter, elle révèle sa véritable nature : une femme combative  politiquement et résolument déterminée  et à faire triompher le droit des femmes dans une société juste et solidaire.

Niger Voice : Mme la Présidente pouvez-vous vous présenter aux auditeurs de Niger Voice ?

Mme Ousseini Hadizatou Yacouba : Bonsoir Mohamed. Merci de cet honneur que vous me faites en m’invitant à votre studio. Je suis Mme Ousseini Hadizatou Yacouba, je suis la Présidente Nationale du PNDS-TARAYYA, membre du Bureau Politique du parti, avec une expérience de plus de 35 ans, comme Cadre supérieur au sein de l’Administration publique du Niger et dans des organismes internationaux. Je suis actuellement Directrice de cabinet adjointe à la présidence de la République du Niger.

Niger Voice:  Vous êtes ici à New York depuis quelques jours pour une rencontre internationale. Pouvez-vous, Mme la Présidente, nous dire l’objet de votre visite ?

Mme Ousseini Hadizatou Yacouba : Effectivement, je suis ici depuis près de deux semaines, dans le cadre d’une mission officielle, dans la délégation nigérienne qui a participé à la 59ème session de la Commission des Nations Unies sur la condition de la femme, Communément appelée la « CSW 59 ». C’est une Commission fonctionnelle du Conseil Economique et Social qui a été instituée depuis 1946 et qui se consacre à l’égalité des sexes et à la promotion de la Femme. Cette commission tient ses sessions chaque année au mois de mars et les pays du monde entier attendent cet évènement avec une grande préparation. Les délégations des pays sont généralement composées des institutions gouvernementales, des parlements et organisations de la société civile. Donc, je suis ici, dans un cadre officiel, pour accompagner la ministre en charge de la Promotion de la Femme venue avec une délégation forte de plus de trente (30) membres. Nous l’avons aidée à participer aux différents évènements organisés, à savoir la préparation du panel du Niger, la participation aux différentes consultations régionales, notamment au niveau de l’Union Africaine, de la CEDEAO et de la Francophonie.

Par ailleurs, en tant que femme politique, j’ai eu à participer aux évènements organisés par l’Internationale Socialiste des Femmes. L’Internationale Socialiste des Femmes est une organisation qui est issue de l’Internationale Socialiste qui regroupe plus de cent quatre-vingt (180) pays à travers le monde et mon pays étant membre de l’Internationale Socialiste, j’ai eu à participer, aussi, au titre du Niger, à toutes les sessions qui ont été organisées dans ce cadre ici à New York.

Niger Voice : Comment va le Niger maintenant ?

Mme Ousseini Hadizatou Yacouba : Je suis sûre que vous, et vos auditeurs, suivez régulièrement l’actualité du pays ; pour preuve, différents sites web et médias de la diaspora en font échos. Et, par la grâce d’Allah, je peux dire que le Niger se porte très bien. Avec la mise en œuvre du Programme de la Renaissance, depuis bientôt quatre ans, il y a eu un certain nombre d’investissements, il y a eu beaucoup de réalisations qui ont été effectuées, notamment des infrastructures routières, des centres de santé, des centres scolaires, des points d’eau ; d’importants emplois créés qui contribuent à rapprocher les villages des villes et à améliorer les conditions de vie des populations.

Les nouvelles du « Front » renforcent la quiétude de nos concitoyens. Nos Forces de Défense et de Sécurité, avec tout l’appui dont elles ont bénéficié, avec la coopération régionale entre les armées de différents pays qui ont fait reculer le phénomène Boko Haram, on peut dire que les nouvelles qui nous parviennent assurent la quiétude des populations.

Comme vous le savez, la paix et la sécurité sont les bases premières de tout développement et je peux dire qu’au Niger, nous avons eu la chance d’avoir eu un Président de la République visionnaire qui, très tôt, a pris le phénomène à bras le corps, à travers des dispositions qui nous permettent de circuler libres dans la sous-région ; des dispositions qui ont aussi permis de mobiliser plein de partenaires pour assurer autant la paix et la sécurité dans notre pays que dans les pays limitrophes. Le cas du Mali est là comme exemple. C’est grâce au leadership du Président, Son Excellence Issoufou Mahamadou,  que très tôt  le Mali a pu bénéficier des appuis qui ont permis aujourd’hui de rétablir la démocratie dans ce pays.

Niger Voice :  Pourtant, Mme la Présidente, ce que nous Nigériens de l’extérieur, nous lisons sur internet, sur les médias et les réseaux sociaux,des déclarations de certains acteurs de la société civile, de l’Opposition et même du Médiateur de la République qui font état de beaucoup de corruption, du mauvais fonctionnement et de la politisation de l’Administration publique. Aussi, Mme la Présidente, on assiste depuis un certain temps à beaucoup d’arrestations dans les rangs de l’opposition… Que dites-vous ?

Mme Ousseini Hadizatou Yacouba : Vous savez, la corruption et le mauvais fonctionnement de l’administration ne datent pas d’aujourd’hui. Ce sont des maux qui ont miné la Gouvernance de notre pays depuis des décennies. Mais, fort heureusement, les statistiques, les données sont là pour le prouver, il y a eu d’importantes mesures qui ont permis de faire fléchir à la base ces différents maux. On n’est certes pas arrivé à les éradiquer pour le moment. Parce que, vous pouvez voir avec les données de « Transparancy International », il a été constaté que le Niger est passé de la 123ème place, en 2009, à la 109ème place par rapport à l’état de la corruption. C’est dire qu’il y a eu des pas en avant qui ont été faits. Pour éradiquer ces maux, il faut un combat de longue haleine. Un mal qui a pris des racines profondes, vous ne pouvez pas du jour ou lendemain, comme par une baguette magique, l’éradiquer, il faut du temps pour cela. Je pense qu’il y a eu des mesures qui ont été prises pour y arriver.

Tout récemment, en Décembre 2014, à l’occasion de la commémoration de la Proclamation de la République, le Président de la République, dans son discours à la Nation, avait appelé à une renaissance culturelle et pour appeler les gens à un changement de mentalité et de comportement. Je pense que c’est dans ce sens-là que, après un constat des différents maux qui minent notre administration et qui empêchent l’Administration et à la Gouvernance d’aller comme cela se doit, que ce message a été lancé.

Et, je pense que de ce que j’ai vu avant de venir ici, le gouvernement est en train de prendre des mesures pour pouvoir éradiquer tous ces maux. La HALCIA est là, elle fait des investigations, elle prend des mesures préventives et coercitives. Certaines mesures sont prises pour éviter que certains fléaux perdurent. Parlant des arrestations dans les rangs de l’opposition et des médias, combien de cas y en-t-il eu pour que vous parliez de « beaucoup » d’interpellations ? Nous sommes quand même plus de dix-sept (17) millions de nigériens, et vous êtes libres, je suis libre de mes mouvements. Est-ce qu’on peut aller trouver quelqu’un chez lui et l’arrêter, l’interpeller sans qu’il n’ait fait quelque chose qui contrevienne aux lois et règlements de la République ? Je ne le pense pas.

Nous sommes en démocratie, si quelqu’un a été interpellé c’est parce qu’il a eu à faire quelque chose qui conduit à ce qu’on l’interpelle. Demandez à ceux qui ont eu à faire ces interpellations, ils vous diront les raisons, mais moi en tant qu’ observateur de la vie politique je peux dire qu’on ne peut pas interpeller quelqu’un sans cause.

Parlant des médias, il faut dire que la liberté de presse doit plutôt aller de pair avec une certaine déontologie, avec le respect de certains principes du métier. Mais, les journalistes sont là et je pense que, pour avoir vécu dans ce pays, même si j’ai été dans des organisations internationales, j’ai passé la plus grande partie de mon temps au Niger et je sais qu’il y a eu de grandes avancées. Il fut un temps où moi, en tant que femme participante à la vie politique, je me cachais pour faire certaines interviews dans les médias. Aujourd’hui, ce n’est pas le cas. Je suis là devant vous pour parler de certains aspects et je pense qu’on ne va pas m’arrêter par rapport à ce que je vais dire. Mais, aussi, il faut faire attention ! La République a ses règles, il faut respecter la République. On ne peut pas, sur la base de cette liberté que nous accorde la démocratie,  poser certains actes qui nuisent à la République.

Niger Voice :  Mme la Présidente, suite à l’« Affaire de Charlie » qui a causé plusieurs pertes en vies humaines, l’Opposition politique accuse le Président de la République, SEM Mahamadou Issoufou, d’être le responsable de ces malheureux évènements. Que dites-vous ?

Mme Ousseini Hadizatou Yacouba : Je ne connais pas une affaire « Charlie » au Niger, comme vous l’évoquez. Je me dis aussi que vous avez une lecture sélective de l’actualité du pays. Par contre, je sais qu’il y a eu une attaque terroriste contre le journal satirique français « Charlie Hebdo » à Paris qui a fait douze morts. Je sais aussi que notre Président, Son Excellence Issoufou Mahamadou, comme beaucoup d’autres leaders, Chefs d’Etat et de Gouvernement, a eu à participer à une marche pour la République, à l’appel du Président François HOLLANDE. Vous savez, je l’ai dit tantôt, nous avons eu la chance d’avoir un président visionnaire qui, très tôt, a pris à bras le corps la question du terrorisme. Nous avons un pays qui dans sa partie nord est traversé avec des trafics de tous genres. Depuis la chute de la Libye, il a été fait cas de pleins d’armes et autres trafics de la Libye au Mali en passant par le Niger. Je pense que, si le Niger n’a pas eu à faire face au problème que le Mali a connu, c’est parce que nos dirigeants ont pris des mesures conséquentes. Et, c’est cet engagement et ce combat contre le terrorisme, cet engagement pour assurer la paix et la sécurité dans notre pays qui a fait que sa voix porte et il y a eu des échos à travers le monde. C’est ce qui a fait aussi que le Mali a pu bénéficier de plein d’appuis ; aujourd’hui la MINUSMA a une base au Mali pour contribuer à sécuriser la zone Nord de ce pays. Cela, je peux dire que notre Président a été le pionnier. C’est sa voix qui a été entendue.

Niger Voice : Est-ce que sa participation à la « marche républicaine » française n’est pas aussi une des causes de cette attaque de Boko Haram à Diffa ?

Mme Ousseini Hadizatou Yacouba : Boko Haram a existé avant l’attaque du journal « Charlie Hebdo ».

Niger Voice : Je parle de l’attaque de Diffa. …

Mme Ousseini Hadizatou Yacouba : L’attaque de Diffa ? Vous pensez que c’est sa marche qui a occasionné cela ? Alors, dites-moi, pourquoi Boko Haram attaque aussi le Nigéria ? Pourquoi Boko Haram attaque le Cameroun ? Pourquoi Boko Haram attaque le Tchad ? Et, pourquoi Boko Haram n’est pas allé attaquer les autres pays qui ont eu à marcher aux côtés du Président Issoufou Mahamadou ?

Mais, laissez-moi vous dire que c’est ce genre de lecture biaisée qu’ont eu malheureusement certains nigériens et nigériennes en pensant que voilà une occasion à saisir pour faire tomber le régime. Et, au Niger, nous avons eu des évènements malheureux qui ont été décriés par la majorité des patriotes. Les évènements des 16 et 17 janvier 2015 où il y a eu des pertes en vies humaines, où il y a eu d’investissements importants qui ont été détruits à jamais, autant individuels que publics, soit disant, parce que le Président a participé à la marche pour la République, à la marche contre le terrorisme.

Aujourd’hui, si le Niger est à feu et à sang, que Dieu nous en préserve, il n’y aura pas de sélection entre les gens de l’Opposition et les gens de la Majorité ; aujourd’hui, si le Niger est en guerre, il n’y aura pas de sélection partisane, c’est ce que les autres doivent comprendre. Et ce sont ces individus qui ont voulu utiliser le fait que le Président ait participé à cette marche pour dire voilà quelqu’un qui est contre notre religion musulmane. Mais, Dieu merci, les érudits, autant musulmans que chrétiens, se sont élevés pour se désolidariser de tout ce qui s’était passé durant ces deux jours. Malheureusement, les partis membres de l’Opposition ont emboité le pas le 18 janvier 2015 pour faire des saccages. Comment est-ce que des gens qui aspirent à gouverner notre pays peuvent le faire en détruisant les investissements qui sont faits. La construction d’une nation ne se fait pas en un jour, vous bâtissez sur ce que vous avez trouvé. Et si nous avons eu la chance que pendant ces quatre ans on ne fait qu’investir et construire et si vraiment ils ont l’amour de notre pays, qu’ils essayent de préserver ce qui a été fait et qu’ils prennent l’engagement auprès du peuple nigérien à venir faire leur part de partition pour venir aussi investir et construire. Et, c’est comme ça que le Niger va grandir. Ce n’est pas pendant que certains construisent et que d’autres détruisent que le Niger va se développer. Le Niger nous appartient tous. Le Niger n’appartient pas à une partie de la population. Il nous appartient tous. Mais, les règles du jeu sont faites de sorte que vous devez chercher l’adhésion du peuple pour gouverner. Nous avons un texte fondamental qui dit que le mandat est de cinq ans et maintenant l’alternance, elle se fait par les urnes ! Alors, évitons de créer des troubles, évitons d’appeler à la rébellion, évitons d’appeler à un soulèvement, évitons d’appeler à une guerre civile, mais cherchons à avoir les voix du peuple pour gouverner. C’est l’appel que je peux lancer. Mais, dire que c’est la participation à la marche qui amené Boko Haram, j’invite ceux qui le disent à aller voir pourquoi Boko Haram est au Nigéria depuis des décennies.

Niger Voice : Madame, il y a eu quand même le chef de Boko Haram, Aboubacar SHEKAOU, qui a menacé directement le Président de la République pour avoir participé à cette marche. Et, c’est juste après qu’il y a eu l’attaque de Diffa.

Mme Ousseini Hadizatou Yacouba : Mais, pensez-vous que ce monsieur qui se dit Boko Haram et qui pourtant utilise ce que Boko a amené, notamment les armes, pensez-vous que c’est un musulman ? Pensez-vous que ce qu’il fait, ce sont des préceptes de la religion musulmane ? Aucune religion ne va appeler un enfant à aller égorger son père. Aucune religion ne va appeler un enfant à prononcer le divorce de ses parents et aller chercher un autre mari pour sa mère. Aucune religion ne va faire porter des bombes à des enfants qui ne savent rien pour les utiliser. Aucune religion ne va séquestrer des filles contre leur gré. C’est ce qui se passe aujourd’hui avec Boko Haram.

Niger Voice : Ce sont des terroristes, nous en sommes, tous, d’accord là-dessus et nous condamnons, tous, ce qu’ils sont entrain de faire. Mais, suite à la participation du Président de la République à la « marche républicaine », il y a eu quand même des soulèvements au Niger et même des pertes en vies humaines ! Pourquoi le Président de la République n’a-t-il pas présenté des excuses au peuple Nigérien ?

Mme Ousseini Hadizatou Yacouba : Pourquoi, il va présenter des excuses ?

Niger Voice : Vous pensez qu’il ne doit pas présenter des excuses ?

Mme Ousseini Hadizatou Yacouba : Qu’est-ce qu’il a fait pour devoir présenter des excuses ? Est-ce qu’il a contrevenu à la Constitution du Niger ? Je ne pense pas. Voilà un homme qui, aujourd’hui, a l’amour de son pays, qui, aujourd’hui, cherche à le placer parmi les pays émergents, qui cherche à faire en sorte que la croissance se conjugue à deux chiffres et vous voulez que le Président présente des excuses au peuple ? Si quelqu’un doit présenter des excuses au peuple, ce sont ceux qui ont créé les soulèvements des 16, 17 et 18 janvier 2015, au Niger. Ce sont ceux qui ont conduit à tuer plus de douze personnes, ceux qui ont fait beaucoup de blessés, ce sont ceux qui ont détruit des églises, des lieux de culte et de loisir, des investissements faits au Niger, il y a plus de trente (30) ans. C’est ceux-là qui doivent présenter des excuses au Pays. C’est eux qui n’aiment pas le Niger. Ce n’est pas Son Excellence Issoufou Mahamadou. Comparez tous les présidents que le Niger a eus et faites la corrélation avec le temps qu’ils ont passé au pouvoir et faites le bilan. Laissez le bilan parler.

On parle du train, depuis que moi, je n’ai pas mis les pieds à l’école. Aujourd’hui, cela devient une réalité, au Niger. Des échangeurs qu’on ne voit qu’à la télévision, peut-être, aujourd’hui, les écoles sous paillottes sont entrain de devenir un mauvais souvenir, parce qu’au fur et à mesure, ces écoles sont entrain d’être remplacées en matériaux définitifs ; le plateau technique au niveau de la santé est amélioré, mieux, aujourd’hui, rares sont les villages qui ne disposent pas de puits au Niger. Nous avons vu une période où l’on faisait des puits sans qu’il n’y ait jamais une goutte d’eau. Moi, en tant que acteur du développement, j’en ai vu de mes propres yeux.

Niger Voice : Madame, je veux juste dire surtout le fait que le Président de la République, lorsqu’il a participé à cette « marche républicaine », a eu à dire sur une chaîne internationale que «  nous sommes tous Charlie ». Je crois que c’est ce qui a occasionné les soulèvements. Il a eu à donner des explications, mais vous pensez qu’il ne doit toujours pas présenter des excuses.

Mme Ousseini Hadizatou Yacouba : Il n’y a pas d’excuses à présenter.

Niger Voice : Madame, Etes-vous « Charlie » ?

Mme Ousseini Hadizatou Yacouba : Soyons sérieux, s’il vous plait, s’il vous plait, soyons sérieux. Il y a des gens qui travaillent. Maintenant, que ceux qui ne travaillent pas laissent les autres travailler et qu’ils évitent de salir le pays. Question « Affaire Charlie », j’ai déjà répondu à cela et je ne vais pas y revenir.

Niger Voice : Madame, Etes-vous « Charlie » ?

Mme Ousseini Hadizatou Yacouba : Aujourd’hui, notre grande préoccupation, c’est le phénomène Boko Haram ; notre grande préoccupation, c’est la sécurité de notre pays ; notre grande préoccupation, c’est que la pauvreté recule dans notre pays. Je pense que c’est cela le plus important. Laissez le pays avancer.

Niger Voice : Madame, je reviens quand même sur ma question. Depuis les attentats de janvier dernier à Paris, est ce que vous êtes « Charlie », Madame ?

Mme Ousseini Hadizatou Yacouba : Pourquoi, voulez-vous qu’un débat sur l’actualité du Niger se limite à cette question ? Je ne veux pas revenir sur cette « Affaire Charlie ». Aujourd’hui, comme je vous l’ai dit, la grande préoccupation des patriotes, c’est le phénomène Boko Haram, aujourd’hui, notre grande attente, c’est la préparation des élections dans moins d’un an. C’est cela, notre actualité.

Niger Voice : D’accord. Madame la Présidente, après toutes vos luttes politiques, êtes-vous satisfaite de la place qu’occupent les femmes dans le régime actuel, je veux dire, sous la septième République ?

Mme Ousseini Hadizatou Yacouba : Regardez cette image : vous avez quelqu’un qui est au fond d’un puits, vous commencez à le remonter, il arrive à un niveau où il commence à bien respirer, vous lui demander si ça va. Il va vous dire bien sûr que ça va, mais si vous arrêter la remontée, vous allez en faire un malheureux ; au contraire, il va vous presser de continuer à le remonter. La question des femmes au Niger, nous étions partis d’une situation où il n’y avait que très peu d’attention pour les femmes. Il vous souviendra qu’à la veille de la Conférence nationale, un 13 Mai, que des femmes ont eu à marcher. Pourquoi ? Parce que, lorsqu’on a composé le Comité préparatoire de la Conférence nationale souveraine, il n’y avait qu’une seule femme. Les femmes se sont senties frustrées et elles sont soties, toutes tendances confondues, les marchés se sont vidés et il y a eu cette marche historique, le 13 mai, pour revendiquer une juste participation des femmes dans les instances de prise de décision. En ce moment, on n’avait une seule femme à l’Assemblée Nationale, aujourd’hui, je pense que, si je ne me trompe pas, la représentativité des femmes au niveau de l’Assemblée Nationale est à un niveau de 13%. Pourtant, au moment où cette Assemblée avait été mise en place, le quota que nous avons eu, de longue lutte, en 2000, était de 10% pour les fonctions électives.

Aujourd’hui, nous avons plusieurs femmes qui sont présidentes d’institutions, nous avons des femmes qui sont à un haut niveau de prise de décision, dans toutes les sphères. Avant, les femmes étaient très actives dans le secteur informel et quand vous voulez voir des femmes entrepreneurs, elles sont rares. Aujourd’hui, elles sont nombreuses. Et, même en milieu rural, avec les activités génératrices de revenu et les opportunités d’allègement des taches qui leur sont accordées, les femmes sont devenues très actives. Donc, c’est pour dire oui, il y a certaines satisfactions parce qu’il y a eu de grandes avancées. Mais, nous sommes en bon chemin. Il faut continuer avec cette dynamique. Nous avons besoin de femmes solides, capables de se faire comprendre, de participer activement. Nous avons besoin aussi d’hommes conscients de la nécessité de travailler hommes et femmes, la main dans la main, pour que la question des quotas ne soit qu’un mauvais souvenir et que sur la base de notre texte fondamental, la Constitution, qui reconnait l’égalité de tous, dans toutes les sphères de la nation, pour que sur cette base, que les femmes et les hommes puissent participer équitablement au développement de leur pays et dans tous les domaines. C’est cela notre vœu.

Et, cette interview intervient à un moment où les femmes du monde entier ont convergé aux Nations Unies pour faire entendre leur voix, pour faire le bilan du chemin parcouru. Et, il a été unanimement reconnu, à travers la plupart des pays, que beaucoup reste encore à faire. Au Niger, par exemple, si je regarde le secteur de l’éducation, c’est vrai que beaucoup de filles accèdent à l’école, mais, jusqu’à présent, nous n’avons pas l’égalité entre filles et garçons par rapport au maintien des filles à l’école. Cela, pour plusieurs raisons : il y a le mariage précoce, il y a le niveau de pauvreté qui fait que les filles sont plus utilisées, à la maison, par leur maman, il y a d’autres préoccupations culturelles qui font, peut-être, que les filles ne sont pas assez assidues ou même ne s’intéressent pas aux sphères scientifiques tout comme les garçons. Donc, c’est pour cela que nous disons oui, il y a eu des avancées, mais nous avons besoin que ces avancées soient soutenues, qu’elles puissent continuer pour qu’au fil du temps, la situation soit  meilleure.

Niger Voice : Mme la Présidente, s’agissant des Elections générales en perspective au Niger, comment préparez-vous les Elections générales de 2016 ? Pensez- vous qu’elles (c’est-à-dire les Elections générales de 2016) vont se dérouler en temps prévu ? Et, pensez-vous qu’elles seront libres, crédibles et transparentes comme l’a dit le Président du PNDS, Monsieur Bazoum Mohamed ?

Mme Ousseini Hadizatou Yacouba : Vous savez, voter est un devoir citoyen. Et, comme tout citoyen, je me prépare en conséquence, je prépare mes enfants, je prépare ma famille. Mais, comme tout responsable politique, je m’informe sur le processus en cours afin de véhiculer cette information au niveau de ma base et surtout, comme premier responsable au niveau des femmes de mon parti, je dois faire en sorte que les femmes puissent répondre au-delà du quota. Vous savez que tout récemment, il y a eu un relèvement de ce quota qui est passé de 10 à 15% pour les fonctions électives, mais il ne peut y avoir de quota qu’avec la mobilisation des femmes. S’il n’y a pas de femmes candidates, même s’il y a une loi, il y aura zéro femme au niveau des élections locales et législatives.

Donc, pour moi, c’est un devoir que conscientiser, d’assurer la formation des femmes pour qu’elles comprennent l’enjeu et qu’elles se préparent à être candidates. Parce que, le combat que, personnellement, je mène, ce n’est pas les femmes pour les femmes, mais des femmes à égalités selon leurs capacités et leurs compétences. On n’élit pas une femme juste parce qu’elle est une femme, non ! Mais, on élit une femme parce qu’on sait qu’elle est capable.

Elle sait de quoi il s’agit et elle est capable de participer dans le développement de sa localité.C’est de cela qu’il s’agit ! Et, mon exercice, c’est d’amener mes camarades à comprendre que leur participation est importante. A faire en sorte qu’elles aient confiance en elles-mêmes et qu’elles participent de façon responsable à cet exercice pour les élections qui nous attendent dans moins d’un (1) an.

Niger Voice : Madame, pensez-vous que ces élections de 2016 vont être crédibles, libres, transparentes ?

Mme Ousseini Hadizatou Yacouba : Il n’y a pas de raison à ce qu’il n’en soit pas ainsi ! Il y a des institutions rodées dans la préparation des élections au Niger qui s’en occupent ! J’ai confiance dans les institutions de mon pays et je ne doute pas un seul instant de leurs capacités. Je pense que, plutôt, tous les citoyens et démocrates sincères doivent les aider et faire en sorte que, comme de coutume, nos élections puissent avoir ce label de libres, transparentes et crédibles. C’est tous ensemble qu’on doit y contribuer. Mais, laissons les institutions faire leur travail. Bientôt, je pense qu’il va y avoir le recensement pour le fichier électoral. Le Comité national du fichier électoral est à l’œuvre, la CENI va être en place, donc laissons les institutions faire leur travail ! Mais, maintenant, nous en tant que démocrates, préparons-nous à y participer de manière responsable.

Niger Voice : Pourtant, l’Opposition a beaucoup de doute sur la Présidente de la Cour Constitutionnelle.

Mme Ousseini Hadizatou Yacouba : Est-ce que la Cour Constitutionnelle organise les élections ? Je ne pense pas que c’est le cas au Niger. Je ne sais pas si cela se fait dans d’autres pays, mais au Niger, ce n’est pas la Cour Constitutionnelle qui organise les élections.

Niger Voice : Madame, pensez-vous que les élections vont se tenir à la date prévue ?

Mme Ousseini Hadizatou Yacouba : Il n’y a pas de raison à ce qu’il n’en soit pas ainsi ! Pourquoi en douter dès maintenant ? Je pense que l’Opposition aussi, à travers les différents partis qui la composent, participe au Comité national du fichier électoral ; il y a aussi le CNDP, donc laissons, encore une fois, ces institutions faire leur travail, mais engageons-nous, comme je l’ai dit tantôt, de manière responsable, ne cherchons pas des poux dans un crâne rasé.

Niger Voice : Merci Madame la Présidente. Depuis un certain temps, nous observons beaucoup de sorties et de meetings populaires organisés par certains responsables du PNDS dans leur localité comme c’était le cas, la semaine dernière, à Bonkoukou, de Monsieur Alkache Alhada, président de la Cours des Comptes du Niger et membres très influent du PNDS. Que dites-vous madame ?

Mme Ousseini Hadizatou Yacouba : Vous savez, les meetings ont toujours existé et au niveau de tous les partis politiques.

Niger Voice : Etes-vous déjà en campagne ?

Mme Ousseini Hadizatou Yacouba : Je ne sais pas si, en m’invitant sur votre plateau, c’est pour me faire dire que je suis en campagne. Vous m’avez invité en tant que citoyen nigérien pour venir échanger…

Niger Voice : en tant que Présidente des femmes du PNDS ….

Mme Ousseini Hadizatou Yacouba : Si cela vous fait dire que je suis en campagne, allons-y .Mais je vous ai dit que je suis en mission officielle ici. Vous m’avez posé certaines questions et je me suis prêtée au jeu ! Maintenant, si c’et à travers cela que vous me faites dire que je suis en campagne, bon, c’est vous qui le dites ! Mais, moi, je sais que je ne suis pas en campagne. Mais, en rencontrant des camarades, je ne fais que mon devoir de responsable d’une structure politique, comme je le fais au Niger, comme je le fais dans tous les pays que je visite. En étant libre, je mène mes activités politiques. Et, cela je pense que ce n’est pas interdit. Et, je pense que tout le monde le fait.

S’agissant des activités de M. Alkache à Bonkoukou, cela s’est passé à une période où je n’étais pas au Niger. J’ai lu sur internet, tout comme vous peux être, une activité de la Cour des Comptes à Bonkoukou. Est-ce que par ce que M. Alkache est de Bonkoukou, cela doit empêcher à la Cour des comptes de mener des activités à Bonkoukou ? Est-ce parce qu’il est un camarade du PNDS-Tarayya et qu’il Président de la Cour des Comptes, Bonkoukou doit cesser d’être une localité du Niger ? C’est une activité de la Cour des Comptes qui a été menée à Bonkoukou. Où est le tort dans cela ? Mais maintenant, je sais que votre radio porte, vous pouvez joindre le Président de la   Cour des Comptes, posez lui la question et il va vous répondre. Mais, moi, je pense que ce n’est pas parce que quelqu’un dirige une institution, qu’à cause de cette institution, sa localité d’origine doit être taboue par rapport à des activités normales. On est au Niger et toutes les localités se valent. Et, je me dis, c’est quand même un plaisir que de voir que des institutions, de plus en plus, mènent des activités à l’intérieur du pays et ne se limitent pas uniquement à la  capitale. Cela est quelque chose qu’il faut au contraire saluer, au lieu de les décrier ! Vraiment mobilisons-nous pour assurer le développement de notre pays, investissons dans cela, la démocratie a besoin de cela.

La démocratie a besoin de toutes les voix. Mais, ne n’est pas parce que nous sommes dans un pays de démocratie qu’il faut qu’il y ait une catégorie qui a la voix, qui peut se permettre de tout dire pendant que l’autre partie doit juste entendre, se taire ou se mettre très bas. Non ! Je pense que, ne nous amenons pas à cela, nous sommes tous des nigériens, même si nous évoluons dans des partis politiques, nous devons quand même avoir l’amour de notre pays, nous devons aussi chercher à consolider les institutions de la République et non chercher les dénigrer. Une institution existe, de par le texte fondamental de notre pays. Elle n’existe pas du fait d’un seul parti politique. Je pense que c’est tous ensemble que nous avons accepté notre Constitution. Donc, acceptons aussi de la respecter et de respecter ces institutions et de travailler pour renforcer ces institutions et non chercher à les affaiblir en attaquant les membres de ces institutions un à un. On ne va pas avancer comme cela.

Niger Voice : Madame la Présidente, Niger Voice étant une voix de la Diaspora Nigérienne, quel est votre message, Mme la Présidente, à l’endroit des Nigériennes et des Nigériens qui vivent à l’extérieur du Niger ?

Mme Ousseini Hadizatou Yacouba : Vous savez, moi-même, j’ai eu à vivre, certes pas pour longtemps, à l’extérieur du Niger. Je sais que ce n’est pas facile. C’est pour cela que j’apprécie, je respecte et apprécie le courage de ce ceux ou celles qui, pour une raison ou une autre, ont décidé de vivre à l’extérieur du pays. Ils constituent une grande force parce qu’ils véhiculent l’image de leur pays à l’extérieur et ils ont tout à gagner que cette image soit bonne et qu’elle soit positive, parce qu’elle déteint sur eux. Si le pays est dénigré et que vous circulez on dira que c’est un nigérien, on en dira quelque chose. Maintenant, si la voix de votre pays porte dans le concert des nations, vous allez forcer l’admiration. Ce sont de grands ambassadeurs de leurs pays, leur comportement pourra aussi affecter les relations entre leur pays d’origine et leurs pays de résidence et ils doivent en tenir compte en respectant les lois et règlements de leur pays d’accueil, ils doivent en tenir compte aussi parce que ils constituent une grande richesse pour leur pays ; quelle que soit ce que vous faites à l’extérieur de votre pays, vous gagnez en expérience en vous frottant à d’autres cultures, vous gagnez en expérience et cette expérience constitue une richesse pour votre pays parce que vous pouvez l’amener et l’investir dans votre pays. Nous constatons aussi qu’il y a des transferts monétaires importants de la diaspora vers leurs familles, cela aussi sont des aspects très importants dans les statistiques de notre pays ; je me dis quel que soit ce que la personne fait dans son pays d’accueil, qu’elle le fasse avec dignité, avec respect. Cela l’agrandit, cela grandit son pays. Mais, comme on dit toujours, il ne faut jamais oublier d’où on vient et il ne faut jamais négliger toute contribution que l’on peut faire pour assurer le développement de son pays. Et, Dieu merci, aujourd’hui, la double Nationalité est reconnue au Niger ! Il y a un Conseil des Nigériens à l’Extérieur ! Et, plaise à Dieu, au prochain parlement, la Diaspora, aussi, aura ses représentants. J’espère que les Nigériens et les Nigériennes de la Diaspora vont tous se mobiliser et s’unir pour relever ce défi de la démocratie nigérienne et contribuer efficacement au développement de notre pays.

Niger Voice : Pour finir, Mme la Présidente, nous vous avez le mot de la fin…

Je voudrais sincèrement, Monsieur Mohamed, vous remercier de cette occasion que vous m’avez donnée de m’adresser à vos auditeurs. Vous m’avez permis aussi de connaitre votre média dont j’ignorais l’existence malgré le fait que cela fait trois (3) ans que chaque année, au mois de mars, je viens ici. Dieu merci, vous avez été persévérants et nous avons pu trouver un moment pour me permettre de venir découvrir cette belle initiative. Parce que, je pense, c’est à travers l’échange qu’on se nourrit, c’est à travers l’échange qu’on se forme et c’est à travers l’échange, aussi, qu’on apprend. Et, sur la base de ce qu’on a appris, on essaie de voir quel type de contribution on peut amener. La communication, c’est quelque chose de très important et je vais vous inviter, à travers la communication, à contribuer à unir les Nigériens et non à les diviser. Peut-être, au Niger, nous pouvons être divisés, chacun va de son côté, mais quand vous êtes à l’extérieur, c’est vraiment important de vous montrer unis. Vous êtes ici, le Niger en miniature. Faites en sorte que ce soit des débats porteurs qui vont dans le sens de la préservation de la Démocratie et non dans le sens de créer l’anarchie. C’est comme cela que nous pouvons avancer. Et notre Démocratie est quelque chose qui a été cité en exemple et nous en sommes fiers. Mais, pour qu’elle demeure et pour qu’elle soit durable, nous avons besoin de tout un chacun. Autant le Pouvoir, autant la Majorité, autant l’Opposition dans le jeu de la démocratie. Permettez-mois, avant de finir, en tant que femme, de m’adresser particulièrement à mes sœurs de la Diaspora en les invitant à saisir cette chance unique qu’elles ont avec les prochaines élections. La Diaspora a cinq (5) sièges. J’espère qu’elles vont faire en sorte d’occuper, au moins, les deux (2) sièges sur les cinq (5) qui sont donnés à la Diaspora. Il ne faut pas vous contenter du 15%. Autant, mes sœurs au Niger, je leur dis que si l’Assemblée Nationale va compter 171 sièges, ne cherchons pas à occuper uniquement les 26 sièges. Cherchons à avoir le tiers (1/3), au moins, si non la moitié (50%). Mais, c’est en se mobilisant. Ce n’est pas en restant de côté et en laissant les hommes débattre tout seul que nous allons y arrivé. Nous devons nous mouillées comme je le fais aujourd’hui. On va vous insulter, mais ce qui porte c’est qu’est-ce que vous amenez comme argumentaire et comme quelque chose de concret et non faire uniquement de la dialectique. Nous avons besoin d’un changement de mentalité, nous avons besoin d’un changement de comportement pour que notre pays continue son décollage et qu’il soit compté parmi les nations émergentes. Je voudrais, tous ceux qui m’écoutent et toutes celles qui m’écoutent, les remercier de leur audience et je souhaite bon vent à votre média, du courage et vive le Niger, je vous remercie.

Interview réalisée par Mohamed SEIDOU pour les services de Niger Voice, le 22 mars 2015.