DISCOURS DU MINISTRE D’ETAT BAZOUM MOHAMED A L’ ATELIER DE VALIDATION DU DOCUMENT DE PROJET DE RECENSEMENT ADMINISTRATIF DE DEVELOPPEMENT A VOCATION HUMANITAIRE

Mesdames et Messieurs les membres du Gouvernement,

Mesdames et Messieurs les membres de l’Assemblée Nationale,

Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,

Monsieur le Gouverneur de la région de Niamey,

Monsieur le président du conseil de ville de Niamey,

Monsieur le président du conseil de la ville de Diffa,

Monsieur le Représentant résident du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés au Niger,

Mesdames et Messieurs les Représentants des Organisations internationales, régionales, sous régionales et communautaires

Mesdames et Messieurs les Représentants des Organisations du Système des Nations Unies,

Mesdames et Messieurs les Représentants des ONG

Distingués invités à vos titres, grades et qualités

Chers participants

Mesdames et messieurs

Je voudrais de prime abord souhaiter la bienvenue et un agréable séjour au Niger à tous nos hôtes qui ont bien voulu faire le déplacement de Niamey pour participer à cet atelier de validation du document du projet de Recensement Administratif de Développement à Vocation Humanitaire (PRAD/H).

Je saisis cette occasion pour exprimer la reconnaissance du Gouvernement du Niger à  la Représentation du Haut-Commissariat des Nations Unies pour  les Réfugiés au Niger pour avoir suscité et appuyé avec détermination cette initiative conjointe  de recensement administratif avec des données  biométriques de la population de  la région de Diffa dont le document de projet vous est soumis aujourd’hui pour validation.

Mesdames et Messieurs,

Le recensement administratif, au même titre que l’enregistrement à l’état civil et le suivi des mouvements migratoires, est une procédure administrative de collecte, de stockage, d’exploitation d’informations sur les populations en vue d’une part, de leur délivrer des documents administratifs de protection tels que le carnet de famille, les actes d’état civil, la carte d’identité nationale, la carte d’identité de réfugié, le permis de séjour, et d’autre part, de disposer des données pour une meilleure planification et de mise en œuvre des actions d’urgence, de développement et d’assistance aux populations déplacées.

Au Niger, depuis 1950, année  de l’institution de l’état civil contemporain, jusqu’en 2011, première année du premier mandat  de  l’actuel  Président de la République Son Excellence Issoufou Mahamadou, l’enregistrement des naissances à l’état civil n’avait guère dépassé 30%. A partir d’avril 2011, les efforts du gouvernement et de ses partenaires visant à améliorer l’offre et la demande des services d’état civil ont permis de rehausser le taux d’enregistrement des naissances à 68% en 2015.

Malgré cette progression très significative , d’énormes défis restent à relever car seule la moitié des actes établis sont retirés par les intéressés et le système tel qu’il existe aujourd’hui ne permet pas la centralisation, le stockage et l’exploitation des données à des fins de protection, d’identification, de sécurité et de statistique, même au niveau local, à plus forte raison au niveau national.

Mesdames et messieurs,  

Sur le plan de l’identification et de la documentation, les circonstances sont nombreuses où les personnes doivent pouvoir décliner et prouver leur identité pour bénéficier de services ou  jouir de droits qui leur sont conférés par la loi. Il en est ainsi de l’accès à l’éducation, aux services de téléphonie, à la santé et aux aides humanitaires. Il en est de même pour les déplacements, les comptes bancaires,  l’achat ou l’héritage de biens,  la souscription à un régime d’assurance-santé,  sans occulter les élections.

Les nigériens ont été témoins des énormes moyens qui ont été déployés pour identifier les usagers des services de téléphonie mobile entre 2008 et 2012. Plusieurs d’entre eux ont aussi mal vécu l’expérience de l’opération d’identification des salariés de l’État à l’occasion des paiements du salaire par billetage en fin 2013. Récemment, ce sont aussi de gros moyens qui ont été déployés par la HALCIA pour inventorier les agents contractuels de l’éducation à l’échelle du territoire national.

Autant de tentatives pour recenser, identifier et mieux connaitre la population dans plusieurs de ses composantes, en vue de rendre efficientes les actions mises en œuvre pour mieux répondre aux attentes légitimes des populations.

Mesdames et messieurs,

Toutes les tentatives de recensement et d’identification jusqu’ici entreprises viennent pallier à la faiblesse du dispositif d’enregistrement et d’identification actuellement en place dans notre pays. En effet, le système n’étant pas centralisé, il est pratiquement impossible de déceler et de corriger les doublons tant dans la délivrance des actes d’état civil que des cartes d’identité nationale. Mais surtout, très peu de personnes sont enregistrées et disposent de documents d’identification.

C’est le cas dans la région de Diffa où vivent aujourd’hui des populations locales non déplacées, des populations retournées, déplacées et refugiées victimes de la crise de Boko Haram.  Dans cette région, une étude sur la problématique de la documentation et le risque d’apatridie auprès des personnes locales et réfugiées du Nigéria, commanditée par l’UNHCR en 2014, relevait que seulement 18% des personnes enquêtées disposaient d’un document d’identité quelconque. Ainsi, la majorité des enquêtés (82%) ne dispose pas de pièce d’identité ou d’état civil. La même étude fait ressortir, selon les critères d’établissement de Nationalité aussi bien au Niger qu’au Nigeria, que 61% de la population enquêtée n’est inéligible à aucune des deux nationalités, donc à risque d’apatridie.

Dans le cadre de l’assistance humanitaire dans cette région, les opérations d’enregistrement réalisées par la Direction Régionale de l’État-civil, des Migrations et Réfugiés de Diffa (DREC/M/R) et les agences humanitaires n’ont pas permis d’aboutir à une identification adéquate des populations affectées par la crise. Cette situation réduit fortement l’efficacité de l’assistance fournie aux populations, des efforts de sécurisation de la région, et  aussi de la planification des actions de développement dans la région.

Mesdames et Messieurs,

Cette problématique de l’identification des personnes dans la région de Diffa dans le domaine humanitaire se pose à un moment où de multiples autres initiatives sectorielles d’enregistrement et d’identification des populations sont en cours ou émergent dans notre pays.

Parmi ces initiatives, on peut citer  notamment:

  • le Projet Carte d’identité biométrique CEDEAO, en application de la Décision A/déc.01/12/14 en date du 15 décembre 2014, qui fait obligation aux États membres à son effectivité avant fin 2016 ;
  • le Programme d’Appui à la Réforme de l’État Civil du Niger (PAREC), financé par l’Union Européenne ;
  • les multiples tentatives de constitution d’un « Fichier électoral biométrique », initiées par la Commission Électorale Nationale Indépendante (CENI) ;
  • le Recensement biométrique des agents de l’État, envisagée par le Ministère en charge de la Fonction Publique, et financé par la Banque mondiale.

Mesdames et Messieurs,

En réponse aux préoccupations d’identification, d’abord  dans la région de Diffa, puis à travers les autres initiatives d’enregistrement,  mon département ministériel, avec l’appui du Haut-commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (UNHCR), et de l’Autorité Nationale d’Enregistrement du Pakistan (NADRA), a formulé le Projet de Recensement Administratif de Développement à vocation Humanitaire (RAD/H) dans la région de Diffa qui  plus tard sera à vocation état civil et identité sur l’ensemble du territoire nationale pour permettre de constituer à terme un registre national de la population.

Ce projet envisage de concevoir, rendre opérationnel et pérenniser un dispositif efficace de recensement et d’enregistrement de données d’identification intégrant la biométrie. Il sera ainsi mis en place un système intégré d’identification qui s’appuie sur une base de données d’état civil rapidement constituée et régulièrement actualisée, devant servir de socle à l’identification des personnes au niveau de la région de Diffa et plus tard de l’ensemble du pays.

Pour ce faire, le projet compte :

  1. créer un vivier national de compétences qui sera chargé de conduire toutes les opérations de recensement et d’indentification pendant la phase projet, et aussi de continuer à gérer le dispositif au-delà du projet.
  1. Constituer et d’opérationnaliser une base de données d’état-civil et intégrant la biométrie par l’opérationnalisation du Centre National de Traitement des Données (CNTD) à Niamey.
  1. Documenter les personnes recensées par la délivrance dès la fin des opérations de recensement, aux personnes âgées de plus de 9 ans d’une carte à puce en guise de document provisoire d’identification. Des commissions administratives seront mises en place pour statuer sur le cas de personnes ne possédant pas de document d’état civil ou qui sont exposés à des risques d’apatridie.
  1. Renforcer le cadre juridique et institutionnel par un appui à une Haute-autorité à la Protection des données à caractère Personnel (HAPD) dont le projet de loi de création est déjà dans le circuit législatif pour adoption par l’Assemblée Nationale. Le projet envisage aussi d’appuyer une Agence Nationale de l’Enregistrement (ANE) qui devra prendre le relais du Projet pour continuer à gérer la base de données biométriques constituée, répliquer l’expérience de Diffa aux autres régions du pays et pérenniser les acquis.

Mesdames et Messieurs,

Comme vous pouvez le constater, le Niger, partant d’une situation de crise humanitaire, essaie de transformer et moderniser son système d’état civil, d’identification et de documentation pour se doter d’un système intégré durable de gestion de l’identification. L’initiative d’identification dans la région de Diffa permet ainsi de créer une dynamique qui fédère autour d’elle toutes les autres initiatives en cours en vue de contribuer à la mise en place d’un système national stable d’Etat civil et d’identification.

En effet,  le système mis en place permettra dorénavant, dans un minimum de délai :

  • L’identification et documentation dans l’assistance aux populations vulnérables ;
  • Le suivi adéquat des mouvements des populations ;
  • Un meilleur suivi de l’aide humanitaire contribuant ainsi à éviter les doubles emplois ;
  • la confection d’un fichier électoral fiable et constamment actualisé ;
  • l’organisation des recensements administratif et général de la population ;
  • la production des documents d’état civil (acte de naissance, certificat de mariage, certificat de décès, certificats de résidence) ;
  • la production de documents d’identification (carte d’identité nationale au format CEDEAO, carte d’identité de réfugiés, titre de séjour).

Mesdames et Messieurs,

Le Gouvernement est convaincu qu’un tel projet  permettra de disposer, une fois pour toutes et en temps réel,  de statistiques  et de données de qualité, à même de crédibiliser  les prises de  décisions stratégiques.

C’est pourquoi j’exhorte toutes les structures nationales parties prenantes au projet à s’impliquer activement dans la finalisation de son document et plus tard dans sa mise en œuvre.

C’est aussi le lieu pour moi de lancer un appel aux partenaires techniques et financiers pour participer activement au présent atelier en vue d’améliorer la qualité du document du projet. Au-delà du présent atelier, le Gouvernement du Niger attend d’eux une contribution à la  mobilisation des ressources nécessaires au financement dudit projet.

Mesdames et Messieurs,

Je ne saurais terminer mes propos sans adresser mes vifs remerciements aux membres du Groupe Technique de Travail, aux consultants nationaux et à l’agence pakistanaise d’enregistrement et de base de données (NADRA),  pour avoir mené avec professionnalisme le processus de formulation  du présent document soumis à votre appréciation.

Au vu de la  qualité des participants à cet atelier, je ne doute un seul instant qu’à la sortie de cette rencontre, le gouvernement disposera d’un document pertinent  qui ralliera toutes les parties prenantes au domaine de l’Etat civil et de l’identification.

C’est sur ces propos  que je déclare ouverts les travaux de l’atelier  de validation du document de Projet de Recensement Administratif de Développement  à Vocation Humanitaire de la région de diffa.

Je vous remercie

M. Bazoum Mohamed 

MINISTERE DE L’INTERIEUR,  DE LA SECURITE PUBLIQUE,

DE LA DECENTRALISATION ET DES AFFAIRES COUTUMIERES ET RELIGIEUSES