Billet/Niger : Bannir l’incivisme !

Dans la cité antique d’Athènes, apprend-on, on pouvait mettre un homme en accusation et le condamner pour incivisme, c’est-à-dire pour défaut d’affection envers l’État. Si cette norme avait cours dans notre pays, la construction des centres de détention allaient grever le budget national.

Selon l’encyclopédie wikipedia : « Le civisme, du mot latin civis, désigne le respect du citoyen pour la collectivité dans laquelle il vit et de ses conventions, dont sa loi. Ce terme s’applique dans le cadre d’un rapport à l’institution représentant la collectivité : il s’agit donc du respect de la « chose publique » et de l’affirmation personnelle d’une conscience politique. Le civisme implique donc la connaissance de ses droits comme de ses devoirs vis-à-vis de la société. Apparu au cours des années 1990, l’emploi de citoyenneté au sens de civisme est contesté. En effet, la citoyenneté n’exprime que la condition de citoyen, tandis que le civisme exprime la condition du citoyen conscient de ses devoirs. »

Le contexte actuel de notre pays caractérisé par la confusion des genres interpelle chacun et tous. A la vérité, il est plus juste de parler ‘’d’incivismes’’ car sur toute la ligne, au Niger, nous avons des attitudes et comportements qui jurent avec le bon sens et le progrès du pays.

En effet, dans les services publics comme privés, dans les marchés, nos écoles, les centres de santé, dans la circulation, etc. il y a vraiment à redire. Si l’on voudrait véritablement inverser la tendance, il n’y a pas 36 solutions : il faut simplement nous reprendre.

Nul doute que c’est la conjonction de toutes ces tares qui nous tire vers le bas : le Niger se voit chroniquement classé dernier même après les pays en guerre ou victimes de catastrophes naturelles. Cette année encore, sans surprise nous sommes 188 ème sur 188 nations classées par le PNUD. Pourquoi une telle malédiction ?

En 2015, à l’occasion d’un café statistique, M. Alichina Kourgueni, Directeur Général de l’Institut National de la Statistique (INS) nous alertait : si on n’y prend garde même en 2016, 2017, 2018, 2019, 2020… ayons le courage de souffrir que le Niger soit classé dernier en attendant nos bonnes attitudes et comportements futurs. Une élégante manière de dire aux Nigériens, faisons du changement de nos mentalités une réalité.

Pour espérer un jour voir notre pays classé parmi les nations qui gagnent, il nous faut non seulement agir sur tous les obstacles qui nous retardent (faiblesse du taux de scolarisation et d’alphabétisation, faiblesse du taux de couverture sanitaire, mal gouvernance) mais aussi lutter efficacement contre l’incivisme dans le pays. L’usage abusif des biens publics, la surfacturation des prestataires, tricher avec le fisc, casser les biens publics ou privés, brûler le feu rouge, pactiser avec l’extérieur contre son pays, la mauvaise gestion du temps etc. sont des différentes facettes d’incivisme bien connues au Niger.

Qui plus est, selon nos experts de l’INS, notre poids démographique annihile tous les efforts fournis par tous les régimes qui se sont succédés. Dans un pays à 80% analphabète avec un taux de natalité le plus élevé au monde, il faut des efforts herculéens pour inverser la tendance. C’est donc bien à propos que les autorités actuelles érigent la Renaissance culturelle en axe N°1 de leur programme de gouvernance car sans un véritable changement de mentalités, la relève en matière d’IDH au Niger n’est pas pour demain.

Les experts de l’INS nous donnent quelques pistes à explorer : Si nous voulons profiter du ‘’dividende démographique’’, alors il nous faut agir à tous les niveaux ; rendons notre système éducatif performant en favorisant la durée attendue de la scolarisation des enfants ; valorisons notre richesse nationale qui souffre d’une économie à moitié informelle ; faisons de l’alphabétisation une urgence et de l’éducation pour tous une priorité, un objectif de développement.

Dans ce sens, feu Garba Djibo ancien ministre de l’Enseignement supérieur a vu juste lorsqu’il disait sur Dounia TV : « Ce que je regrette c’est qu’on ne semble pas comprendre que sans l’école le pays ne peut pas se développer » !

EMS